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Acte Uniforme relatif à la Médiation 2017

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La médiation en droit Ohada, outil de règlement extrajudiciaire des litiges vise non seulement à favoriser la pratique de la médiation aux côtés de l’arbitrage mais aussi et surtout à offrir un cadre juridique sécurisé à ceux qui souhaitent recourir à la médiation comme mode alternatif de règlement des litiges.

OHADA
Acte uniforme relatif à la médiation
Acte fait à Conakry le 23 novembre 2017

Acte uniforme relatif à la médiation, signé à Conakry le 23 novembre 2017

Chapitre 1 ‐ Définitions et champ d’application

La Médiation en Droit Ohada


Article 1.‐ Définitions

Au sens du présent Acte uniforme :
• a) le terme « médiation » désigne tout processus, quelle que soit son appellation, dans lequel les parties demandent à un tiers de les aider à parvenir à un règlement amiable d’un litige, d’un rapport conflictuel ou d’un désaccord (ci‐après le « différend ») découlant d’un rapport juridique, contractuel ou autre ou lié à un tel rapport, impliquant des personnes physiques ou morales, y compris des entités publiques ou des Etats ;
• b) le terme « médiateur » désigne tout tiers sollicité pour mener une médiation quelle que soit l’appellation ou la profession de ce tiers dans l’État Partie concerné.

La médiation peut être mise en œuvre par les parties (médiation conventionnelle), sur demande ou invitation d’une juridiction étatique (médiation judiciaire), d’un tribunal arbitral ou d’une entité publique compétente.

La médiation peut être ad hoc ou institutionnelle.

La Médiation en Droit Ohada


Article 2.‐ Champ d’application

Le présent Acte uniforme s’applique à la médiation. Toutefois, il ne s’applique pas aux cas dans lesquels un juge ou un arbitre, pendant une instance judiciaire ou arbitrale, tente de faciliter un règlement amiable directement avec les parties.

Chapitre 2 ‐ Procédure de médiation


Article 3.‐ Médiation institutionnelle

Le fait de recourir à une institution de médiation emporte adhésion des parties au Règlement de médiation de ladite institution.


Article 4.‐ Début de la procédure de médiation

La procédure de médiation débute le jour où la partie la plus diligente met en œuvre toute convention de médiation écrite ou non.

Si, en l’absence de convention, la partie qui a invité une autre partie à la médiation n’a pas reçu d’acceptation de son invitation écrite dans les quinze jours de la date de réception de l’invitation ou à l’expiration de tout autre délai qui y est spécifié, elle peut considérer l’absence de réponse comme un rejet de l’invitation à la médiation.

Une juridiction étatique ou arbitrale peut, en accord avec les parties, suspendre la procédure et les renvoyer à la médiation. Dans les deux cas, la juridiction étatique ou arbitrale fixe le délai de suspension de la procédure.

Sauf convention contraire des parties, le début de la procédure de médiation suspend le délai de prescription de l’action. Lorsque la procédure de médiation a pris fin sans qu’un accord issu de la médiation soit intervenu, le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à six mois, à compter du jour où la médiation s’est achevée sans accord.

La Médiation en Droit Ohada


Article 5.‐ Nombre et désignation des médiateurs

Les parties choisissent le ou les médiateurs d’un commun accord.

Pour la désignation des médiateurs, les parties peuvent demander l’assistance de toute personne physique ou morale, notamment un centre ou une institution offrant des services de médiation, appelée « autorité de désignation ».

A cet effet, une partie peut demander à l’autorité de désignation de recommander des personnes ayant les qualités et compétences requises pour servir de médiateur.

Les parties peuvent également convenir que l’autorité de désignation nomme directement le ou les médiateurs.

Lorsqu’elle recommande ou nomme des médiateurs, l’autorité de désignation tient compte des considérations propres à garantir la désignation d’une personne indépendante, impartiale et disponible. Elle prend en compte, le cas échéant, le fait qu’il peut être souhaitable de nommer une personne de nationalité différente de celle des parties, notamment lorsque les parties sont de nationalité différente.

Lorsqu’une personne est sollicitée en vue de sa désignation en qualité de médiateur, elle signale toutes circonstances de nature à soulever des doutes légitimes sur son impartialité ou son indépendance. À compter de la date de sa nomination et durant toute la procédure de médiation, le médiateur révèle aux parties, sans tarder, toutes circonstances nouvelles susceptibles de soulever des doutes légitimes sur son impartialité ou son indépendance.


Article 6.‐ Statut du médiateur

Au moment de sa désignation, le médiateur confirme, dans une déclaration écrite, son indépendance et son impartialité ainsi que sa disponibilité pour assurer la procédure de médiation.

Lorsque le médiateur révèle aux parties après sa nomination la survenance de circonstances nouvelles susceptibles de soulever des doutes légitimes sur son impartialité ou son indépendance, il les informe de leur droit de s’opposer à la poursuite de sa mission. Si l’une des parties refuse en conséquence de poursuivre la médiation, il est mis fin à la mission du médiateur.

La Médiation en Droit Ohada


Article 7.‐ Conduite de la médiation

Les parties sont libres de convenir, y compris par référence à un règlement de médiation, de la manière dont la médiation doit être conduite.

A défaut, le médiateur mène la médiation comme il l’estime approprié, compte tenu des circonstances de l’affaire, des souhaits exprimés par les parties et de la nécessité de parvenir rapidement à un règlement du différend.

Dans tous les cas, le médiateur accomplit sa mission avec diligence et accorde, dans la conduite de la médiation, un traitement équitable aux parties et, ce faisant, prend en compte les circonstances de l’affaire.

Le médiateur n’impose pas aux parties une solution au différend. Toutefois, il peut, à tout stade de la médiation, en fonction des demandes des parties et des techniques qu’il estime les plus appropriées au vu des circonstances du différend, faire des propositions en vue du règlement du différend.

Après consultation des parties, le médiateur peut inviter celles‐ci à désigner un expert en vue de recueillir un avis technique.


Article 8.‐ Principes directeurs de la médiation

Le médiateur et toute institution établie dans l’un des Etats Parties offrant des services de médiation adhèrent aux principes garantissant le respect de la volonté des parties, l’intégrité morale, l’indépendance et l’impartialité du médiateur, la confidentialité et l’efficacité du processus de médiation. Le médiateur s’assure que la solution envisagée reflète réellement la volonté des parties dans le respect des règles d’ordre public.

La Médiation en Droit Ohada


Article 9.‐ Echanges entre le médiateur et les parties

Le médiateur peut rencontrer les parties ou communiquer avec elles, ensemble ou séparément. Lorsque le médiateur souhaite rencontrer ou s’entretenir avec l’une des parties et/ou son conseil séparément, il en informe l’autre partie et/ou son conseil au préalable ou dès que possible après sa rencontre ou communication unilatérale avec l’une des parties.

Lorsque le médiateur reçoit d’une partie des informations concernant le différend, il peut en révéler la teneur à toute autre partie à la médiation. Toutefois, lorsqu’une partie donne au médiateur une information sous la condition expresse qu’elle demeure confidentielle, celle‐ci ne doit être révélée à aucune autre partie à la médiation.


Article 10.‐ Confidentialité

Toutes les informations relatives à la procédure de médiation doivent demeurer confidentielles, sauf convention contraire des parties, à moins que leur divulgation soit exigée par la loi ou rendue nécessaire pour la mise en œuvre ou l’exécution de l’accord issu de la médiation.

La Médiation en Droit Ohada


Article 11.‐ Recevabilité des éléments de preuve dans une autre procédure

Une partie à la procédure de médiation, le médiateur et toute tierce personne, y compris celles qui ont été associées à l’administration de la procédure de médiation, ne peuvent, dans une procédure arbitrale ou judiciaire ou dans une procédure analogue ni invoquer ni présenter l’un ou l’autre des éléments de preuve ci‐après ni témoigner à leur sujet :
• a) une invitation à la médiation adressée par une partie ou le fait qu’une partie était disposée à participer à une procédure de médiation, sauf lorsqu’une partie doit prouver l’existence d’un accord ou de l’envoi d’une invitation pour engager le processus de médiation en relation avec l’article 4 du présent Acte uniforme ;
• b) les vues exprimées ou les suggestions faites par une partie au cours de la médiation concernant une solution éventuelle de règlement du différend ;
• c) les déclarations faites ou les faits admis par une partie au cours de la procédure de médiation ;
• d) les propositions faites par le médiateur ou par l’une des parties ;
• e) le fait qu’une partie a indiqué être disposée à accepter une proposition de règlement présentée par le médiateur ou par l’autre partie ;
• f) un document établi aux seules fins de la procédure de médiation.

L’alinéa 1 du présent article s’applique quel que soit le support ou la forme des informations ou des éléments de preuve qui s’y trouvent visés.

La divulgation des informations visées à l’alinéa 1 du présent article ne peut être ordonnée par un tribunal arbitral, une juridiction étatique ou une autre autorité publique compétente. Si de telles informations sont présentées comme éléments de preuve en violation des dispositions de l’alinéa 1 du présent article, ceux‐ci sont irrecevables. Néanmoins, ces informations peuvent être divulguées ou reçues comme éléments de preuve dans la mesure exigée par la loi ou nécessaire à la mise en œuvre ou à l’exécution de l’accord issu de la médiation.

Les dispositions des alinéas 1, 2 et 3 du présent article s’appliquent, que la procédure arbitrale ou judiciaire ou toute procédure analogue se rapporte ou non au différend qui fait ou a fait l’objet de la procédure de médiation.

L’obligation de confidentialité ne s’étend pas aux éléments de preuve préexistants à la procédure de médiation ou constitués en dehors de toute relation avec celle‐ci.

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Article 12.‐ Fin de la procédure de médiation

La procédure de médiation prend fin par :
• a) la conclusion d’un accord écrit issu de la médiation signé par les parties et, si celles‐ci en font la demande, par le médiateur ;
• b) la déclaration écrite du médiateur indiquant, après consultation des parties, que de nouveaux efforts de médiation ne se justifient plus, à la date de la déclaration, ou lorsqu’une des parties ne participe plus aux réunions de médiation malgré des relances du médiateur ;
• c) la déclaration écrite des parties adressée au médiateur indiquant qu’elles mettent fin à la procédure de médiation, à la date de la déclaration ;
• d) la déclaration écrite d’une partie adressée à l’autre partie ou aux autres parties et, si un médiateur a été nommé, au médiateur, indiquant qu’il est mis fin à la procédure de médiation, à la date de la déclaration ; ou
• e) l’expiration du délai de médiation sauf si les parties décident conjointement de prolonger ce délai en accord avec le médiateur.

La partie qui entend se prévaloir de la fin de la médiation est tenue d’en apporter la preuve ; elle peut le faire par tout moyen.

Lorsque la médiation ordonnée par le juge ou par l’arbitre prend fin sans que les parties ne parviennent à un accord, la procédure judiciaire ou arbitrale reprend son cours normal.

Lorsqu’une telle procédure de médiation prend fin par accord amiable des parties, le juge ou l’arbitre constate cet accord, qui peut faire l’objet d’exécution conformément à l’article 16 du présent Acte uniforme.

La Médiation en Droit Ohada


Article 13.‐ Frais de la médiation

Les parties déterminent, soit directement, soit par référence à un règlement de médiation, les frais de la médiation, y compris les honoraires du médiateur.

En cas de médiation judiciaire, la juridiction étatique saisie, qui désigne un médiateur, fixe les frais en accord avec les parties et ordonne la consignation des provisions entre les mains du greffier en chef de la juridiction ou de l’organe compétent de l’Etat Partie. Si une partie ne verse pas sa quote‐part des frais fixés, il est permis à l’autre partie de la verser afin que la médiation puisse être mise en œuvre. A défaut de consignation dans le délai fixé par le juge, sa décision est non avenue et la procédure judiciaire reprend son cours.

Lorsque la juridiction étatique désigne une institution de médiation, elle renvoie les parties à se conformer au barème de cette institution.

Les frais de la médiation sont supportés par les parties à parts égales, sauf convention contraire.


Article 14.‐ Incompatibilités

Sauf convention contraire des parties, le médiateur ne peut assumer les fonctions d’arbitre ou d’expert dans un différend qui a fait ou qui fait l’objet de la procédure de médiation ou dans un autre différend né du même rapport juridique ou lié à celui‐ci.

Le médiateur ne peut assumer les fonctions de conseil dans un différend qui a fait ou qui fait l’objet de la procédure de médiation, ou dans un autre différend né du même rapport juridique ou lié à celui‐ci.

La Médiation en Droit Ohada


Article 15.‐ Recours à une procédure arbitrale ou judiciaire

Lorsque les parties sont convenues de recourir à la médiation et se sont expressément engagées à n’entamer, pendant une période donnée ou jusqu’à la survenance d’un événement spécifié, aucune procédure arbitrale ou judiciaire relative à un différend déjà né ou qui pourrait naître ultérieurement, il est donné effet à cet engagement par le tribunal arbitral ou la juridiction étatique jusqu’à ce que les conditions dont il s’accompagne aient été satisfaites.

Les dispositions de l’alinéa précédent ne sont pas applicables lorsqu’une partie estime nécessaire d’engager, à des fins provisoires et conservatoires, une procédure pour la sauvegarde de ses droits. L’engagement d’une telle procédure ne doit pas être considéré en soi comme une renonciation à la convention de médiation ni comme mettant fin à la procédure de médiation.


Article 16.‐ Exécution de l’accord issu de la médiation

Si, à l’issue de la médiation, les parties concluent un accord écrit réglant leur différend, cet accord est obligatoire et les lie. L’accord issu de la médiation est susceptible d’exécution forcée.

A la requête conjointe des parties, l’accord de médiation peut être déposé au rang des minutes d’un notaire avec reconnaissance d’écritures et de signatures. Le notaire en délivre, à la requête de la partie intéressée, une grosse ou une copie exécutoire.

A la requête conjointe des parties ou, à défaut, à la requête de la partie la plus diligente, l’accord de médiation peut également être soumis à l’homologation ou à l’exequatur de la juridiction compétente. Le juge statue par ordonnance. Il ne peut modifier les termes de l’accord issu de la médiation.

La juridiction compétente se borne à vérifier l’authenticité de l’accord de médiation et fait droit à la demande dans un délai maximum de quinze jours ouvrables à compter du dépôt de la demande.

Toutefois, l’homologation ou l’exequatur peut être refusé si l’accord de médiation est contraire à l’ordre public.

A défaut de décision dans le délai de quinze jours visé au quatrième alinéa du présent article, l’accord de médiation bénéficie automatiquement de l’homologation ou de l’exequatur. La partie la plus diligente saisit le Greffier en chef ou l’organe compétent qui appose la formule exécutoire. La partie adverse qui estime que l’accord de médiation est contraire à l’ordre public peut saisir la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage d’un recours contre l’acte d’homologation ou d’exequatur automatique dans les quinze jours de la notification de l’accord revêtu de la formule exécutoire ; la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage statue dans un délai maximum de six mois. Dans ce cas, les délais prévus par le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage sont réduits de moitié. Le recours est suspensif de l’exécution de l’accord.

La décision du juge qui accorde l’homologation ou l’exequatur n’est susceptible d’aucun recours. Celle qui refuse l’homologation ou l’exequatur ne peut faire l’objet que d’un pourvoi devant la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage, qui statue dans un délai maximum de six mois. Dans ce cas, les délais prévus par le Règlement de procédure de la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage sont réduits de moitié.

Les dispositions des alinéas 4, 5, 6 et 7 du présent article s’appliquent à l’accord issu d’une médiation intervenue en l’absence de procédure arbitrale en cours. Lorsque l’accord issu d’une médiation intervient alors qu’une procédure arbitrale est en cours, les parties ou la partie la plus diligente avec l’accord exprès de l’autre partie peuvent demander au tribunal arbitral constitué de constater l’accord intervenu dans une sentence d’accord parties. Le tribunal arbitral statue sans débat, à moins qu’il estime nécessaire d’entendre les parties.

Chapitre 3 ‐ Dispositions transitoires et finales

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Article 17.‐ Application du présent Acte uniforme

Le présent Acte uniforme tient lieu de loi relative à la médiation dans les Etats Parties. Il n’est applicable qu’aux procédures de médiation commencées après son entrée en vigueur.


Article 18.‐ Publication et entrée en vigueur

Le présent Acte uniforme sera publié au Journal Officiel de l’OHADA dans un délai de soixante jours à compter de son adoption. Il sera également publié au Journal Officiel des Etats Parties.

Il entre en vigueur quatre‐vingt‐dix jours à compter de sa publication au Journal Officiel de l’OHADA.

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